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26 juillet 2012

L’ABOLITION DES PRIVILEGES ( 6 )


C’est un important privilège que celui de n’être pas responsable de l’application de décisions officialisées par un vote auquel on a participé. C’est un privilège d’irresponsabilité et un privilège inquiétant ; le pouvoir législatif ne contrôlant plus le pouvoir exécutif.

C’est au nom du peuple que les lois sont votées par ses représentants. De très nombreuses lois votées ne sont jamais mises en application. Renseignez-vous et vous serez édifiés ! Le temps passé à préparer ces votes et les salaires payés à tous ceux qui y ont participé représentent des dépenses considérables réglées avec l’argent public ; avec notre argent. L’indifférence qui suit a des allures de trahison, mais de trahison acceptée par tous.

Imaginez un artisan qui n’exécuterait pas correctement une réparation et serait à l’origine d’une panne plus ou moins grave. Il ne manquerait pas d’être l’objet de plaintes, de poursuites et de condamnations. Les conséquences sont pourtant moins étendues que celles d’une loi demandée, obtenue et laissée à l’abandon.

C’est encore un privilège de nos représentants qui n’est pas acceptable. Etre candidat pour nous représenter devrait entraîner certaines obligations écrites et signées. On pourrait peut-être imaginer une loi dans ce sens… Il y aurait de fortes chances pour que les décrets d’application soient bloqués quelque part.

Plus un individu s’élève dans la hiérarchie de la société, plus il bénéficie de privilèges divers et variés et plus il délègue ses responsabilités (pas ses avantages) à ceux qui sont au dessous de lui. On a souvent constaté que c’est le lampiste qui risque d’être condamné.

Les fondateurs de notre république et d’une démocratie réelle ont cru qu’ils avaient aboli les privilèges. Eux aussi ont été trahis. Ils voulaient la Liberté et ils ont eu Napoléon, comme ceux qui se sont opposés aux tzars et qui ont connu Staline. On pourrait citer d’autres exemples : l’Espagne avec Franco, le Portugal avec Salazar, etc. Des privilégiés succèdent sans cesse à d’autres privilégiés. Jusqu’où irons-nous ainsi ?

Jusqu’au moment où les élus prendront conscience de cette situation scandaleuse, ou jusqu’au moment où le peuple le leur fera comprendre. En attendant, pour afficher leur bonne volonté, ils pourraient au moins faire de la nuit du 4 août, au cours de laquelle nos révolutionnaires ont cru avoir aboli les privilèges ; ils pourraient faire de cette date une grande fête nationale afin qu’elle ne reste pas une utopie.

 

Prochain texte : « Le mur d’en face. »

14 juillet 2012

L’ABOLITION DES PRIVILEGES ( 5 )

 

Dix ans après le vote de la loi instituant un diplôme d’Etat pour l’enseignement de la danse, en 1970 le ministère de la culture a décidé de prendre le dossier en mains. Il a été créé une commission chargée d’étudier et de mettre au point un texte de loi acceptable par tous. Il est dit souvent que pour enterrer un dossier il suffit de créer une commission. Je ne l’ignorais pas, mais je savais que ce ministère, sollicité par toutes les associations et par les professeurs de danse, voulait travailler sérieusement. La fédération française de danse m’a demandé de participer aux travaux de cette commission présidée par Marcel Landowsky qui était directeur de la musique et de la danse au ministère. Cet homme, célèbre en tant que compositeur, était à la fois compétent, très humain et d’un contact chaleureux. Durand deux années les réunions se tinrent au ministère, rue Saint Dominique à Paris, environ tous les deux ou trois mois… et c’était pittoresque.

Edmond Linval, ancien professeur à l’Opéra de Paris, avec qui j’avais créé la Fédération Nationale de Danse Educative et professionnelle, siégeait à mes côtés et nous observions avec un certain humour les manœuvres de vedettes de l’Opéra qui voulaient s’octroyer des privilèges dans l’enseignement de la danse…

 

Le texte de la première loi de 1960 qui servait de base à nos travaux commençait par cette phrase : « Nul ne peut enseigner la danse contre rétribution, s’il n’est titulaire du diplôme d’Etat. » Nous étions plusieurs à souhaiter une modification, car pouvoir « enseigner sans diplôme si on est ou se prétend bénévole » nous paraissait un véritable privilège risquant de favoriser des incompétences. C’est avec Linval que j’ai été reçu au ministère de la culture par un juriste, Monsieur Chabot. Il comprenait nos arguments, mais il nous a démontré que c’était la Constitution qui exigeait de maintenir ce privilège en précisant : « contre rétribution ». En effet notre Constitution indique qu’il est possible de règlementer une profession, mais pas une activité.

 

Malgré les efforts des uns et des autres, ce n’est que vers la fin des années 1980 qu’un diplôme d’Etat a été établi et rendu obligatoire. Ce qui fait qu’une loi votée à l’origine en 1960 n’a règlementé la profession de l’enseignement de la danse que plus de vingt ans après !

Que je sache, aucun de ceux qui avaient participé au vote en 1960 ne s’est ému de ce retard. Ils avaient fait leur travail et la suite ne les concernait plus…

04 juillet 2012

L’ABOLITION DES PRIVILEGES ( 4 )

  

J’ai terminé mon précédent message par cette phrase : « Alors que font les représentants des peuples ? » Ils travaillent, ils travaillent dur, parfois jusqu’au petit matin… Tout travail mérite salaire ; mais sont-ils plus à la peine que beaucoup de salariés ou de petits commerçants qui vivent avec l’équivalent d’un smig ? Nos représentants discutent, se disputent et s’invectivent sous l’œil des caméras qui font leur promotion à la télévision. Et parfois, tout cela pour rien ; pour du temps perdu et pour notre argent qui l’est autant…

Car il faut tout de même savoir que lorsque, à force de négociations et d’amendements, un texte est enfin voté et adopté ; ce texte ne sera pas mis en application. Non, pour qu’il soit appliqué il est nécessaire que soient promulgués des « décrets et arrêtés d’application ». Alors, après le vote de la loi, ce sont d’interminables tractations interministérielles qui interviennent et peuvent durer des années. Pendant ce temps nos représentants sont satisfaits, ils ont accompli leur tâche, ils ont voté une loi… Si cette loi n’est jamais appliquée, ils n’en subiront aucune conséquence, n’étant pas soumis à une quelconque obligation de résultat pour bénéficier de leurs privilèges.

 

Mes propos nécessitent une explication. Cette situation, je l’ai vécue dans les années 1970. A cette époque, mes activités dans le monde artistique et chorégraphique m’avaient amené à créer un magazine et à être pendant dix années membre du comité directeur de la fédération française de danse. Cette discipline était alors enseignée n’importe comment et par n’importe qui, alors que son apprentissage par des enfants pouvait avoir des conséquences fâcheuses et même dangereuses. Une loi avait été votée le 12 décembre 1960, instituant un diplôme d’état obligatoire pour dispenser cet enseignement. Mais les décrets et arrêtés d’application dépendaient de plusieurs ministères, dont certains étaient notoirement en opposition permanente. Il y avait le ministère de la culture opposé à celui des sports qui considérait que la danse était une gymnastique. L’éducation nationale estimait que tout ce qui concerne l’enseignement lui appartient, tandis que le ministère de la santé devait veiller à ce que cet enseignement ne nuise pas sur ce plan. Il s’ajoutait le ministère du travail pour définir, entre autres, les relations entre les futurs professeurs salariés et leurs employeurs, ainsi que le ministère de la justice pour faire face aux possibles infractions. En tout six ministères peu disposés à travailler ensemble…. Comment sortir de cet impasse qui ne concernait plus nos représentants ?