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22 août 2012

L E M U R

2 – LE MUR APPARAÎT

 

Au cours de ce beau mois de mai, des engins bruyants et polluants sont venus stationner en face de mon bureau. En quelques heures, deux mûriers-platanes, les lilas et les lauriers roses ont été abattus. Pour eux, pas de renaissance printanière.

Rapidement une tranchée fut creusée en bordure de la route. Des ferrailles ne tardèrent pas à recevoir une couche de béton. Ensuite, en une journée, un grand mur fut construit par deux ouvriers compétents aux gestes rapides et surs.

 

 

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L’espace vert et le terrain vague ne sont plus que le souvenir d’un lieu « déclaré inconstructible ». Face à moi, le mur gris, avant d’être coloré, s’élève froid, triste et presque inquiétant.

Je ne veux pas savoir qui a bravé les interdits annoncés et pour quelle raison… Le mur est là. Il constitue une continuité ininterrompue avec ceux qui existaient auparavant. Quand je regarde ce ruban de pierre et de béton, je pense à ces rues sans ouvertures que j’ai connues à Tozeur, en Tunisie. Là-bas, derrière ces barrières, selon leurs coutumes, s’abritent des familles qui cachent pudiquement leur vie paisible.

On ne sait jamais ce qu’il y a ou se qui se cache de l’autre côté d’un mur. Comme le dit la chanson : « Il y a toujours un côté du mur à l’ombre. »

Moi, je me moque de ce qu’il y aura à la place de mon espace vert. Je ne vois que le mur. Je l’observe… et il n’évoque plus Tozeur. Il me fait penser à ces grandes murailles qui fixent les limites à Fresnes, à Clairvaux et ailleurs… Parfois il me semble que désormais il manque un élément à ce nouveau paysage. Pourquoi ne pas ériger un mirador qu’on peindrait en rose comme le mur ; pour le rendre moins lugubre ? Oui, un mirador ou une tour, ce symbole de l’orgueil humain qui dans les tarots est stigmatisé par la lame seize. Toujours plus haut, au-dessus des autres, toujours plus caché, toujours plus secret… chacun chez soi et chacun pour soi… et tant pis pour l’environnement.

 

Dans notre petite localité et dans mon lotissement il reste encore quelques « espaces verts » plus ou moins à l’abandon. Quelle aubaine pour les valeureux constructeurs de murs qui vont pouvoir modeler le paysage à la mode de notre siècle ! Construire des murs en dépit de l’environnement pourrait devenir « tendance » selon l’expression des snobs de notre époque. Au terminus du nouveau tramway un « espace vert » vient d’être aménagé. Comme il deviendrait attrayant si un grand mur l’entourait. Il pourrait devenir une attraction pour touristes…

06 août 2012

L E M U R


1 – AVANT LE MUR

 

Comme il est agréable et apaisant de voir de la verdure en travaillant !

Une fenêtre s’ouvrant sur des feuillages ou sur une prairie suffit pour qu’en levant les yeux une dose de « bio » pénètre dans la pièce, douce et caressante.

Il est vrai qu’en ville les fenêtres s’ouvrent sur un panorama de toitures ou sur des constructions en béton, ou encore sur des avenues bruyantes et polluées.

 

J’ai quitté la ville de mes jeunes années pour m’installer pas très loin, dans un petit village que j’ai connu lorsqu’il ne comptait que cinq cents habitants ; et qui n’en finit pas de devenir une ville.

C’était en 1986. J’ai choisi un terrain d’un peu moins de 500m2 dans un petit lotissement en bordure d’un chemin pour piétons, sur l’emplacement de ce qui fut la voie ferrée du célèbre petit train de Palavas. Il était prévu la construction d’ne trentaine de villas, sans qu’un style soit imposé. Et de plus, dans ce petit lotissement, plusieurs « espaces verts » étaient indiqués sur le plan ; ce qui constituait un argument pour le vendeur. En face de mon terrain se trouvait l’un de ces espaces verts qui, me dit-on, ne pourrait jamais être constructible. Seulement la petite route interne du lotissement m’en séparait.

Dans l’emplacement prévu pour mon garage, j’ai aménagé mon bureau avec vue directe sur l’espace vert. C’est là que des pins devaient être plantés. A leur place, les jardiniers municipaux ont installé trois mûriers-platanes, laissant le reste du terrain à l’abandon. Ainsi mon espace vert se composait de trois arbres et d’un terrain vague. Souvent les herbes se développaient et montaient. Alors le vent y dessinait « les vagues de ce terrain »… Il était bien « tristounet » ce coin de verdure en bordure de la petite route… Alors des voisins eurent l’idée de planter deux lilas sur les côtés, puis d’autres, une rangée de lauriers en fond. Pour ma part, des amis m’avaient offert une plante qui envahissait un petit coin près de ma maison. Pour la contenir on avait attaché ses branches et elle semblait être étouffée par ses liens. Je l’ai enlevée de cet emplacement et je l’ai replantée au centre du terrain pour qu’elle se développe normalement. J’avais l’impression qu’elle se régénérait. Elle devint énorme, constituant un massif d’environ trois mètres de diamètre sur deux de hauteur. Chaque année, pendant quelques semaines, elle se recouvrait de délicates fleurs jaunes qui égayaient mon environnement. J’ignore pourquoi, et sur ordre de qui, les jardiniers municipaux ont arraché cette vieille plante inoffensive et rendu le lieu à l’état de terrain vague.

Heureusement, il restait les lilas. Cette année encore, en 2012, au mois d’avril leurs fleurs ont discrètement décoré les limites de ce lieu.

 

Et puis, brusquement, ce fut un changement radical au cours du mois de mai, quand la nature s’éveille à la vie…