25 septembre 2015
LA RENTREE… OU LES MIGRATIONS DE SEPTEMBRE.
L’encombrement des autoroutes s’est encore manifesté vers la fin du mois d’août et au début du mois de septembre. Il est entré dans nos mœurs ce chassé-croisé des vacanciers en été et les affluences de leurs retours. Leurs plus ou moins longs et agréables changements provisoires de lieu de vie illustrent notre relatif confort malgré nos difficultés que nous devrions considérer comme encore mineures. Le tumulte de notre époque ne nous permet pas toujours d’apprécier ce que nous possédons. Il couvre d’autres tumultes qui ont jalonné notre histoire et qui aujourd’hui enflent de plus en plus dans notre relative indifférence. Pouvoir librement, et selon ses ressources, oublier un temps la routine de la vie quotidienne, pouvoir changer d’air à la mer ou à la montagne, pouvoir se déplacer à sa guise pour ensuite revenir chez soi, c’est un rythme qui nous parait banal ; et il devrait l’être pour tous. Mais c’est pourtant une exception sur notre planète et dans les temps qui ont été vécus. Cet été, à la suite de la parution de mon livre « Les Hauts Lieux Cathares », aux éditions Trajectoire, j’ai rappelé les tragiques épisodes de la conquête d’un territoire devenu le midi de la France. La barbarie et la cupidité du royaume du nord de la Loire et de l’Eglise de Rome ont commis un véritable génocide. Ce fut une « migration guerrière » qui détruisit la civilisation occitane dans les flammes de ses bûchers. Les cicatrices de toute cette région en témoignent encore dans l’indifférence de l’Histoire officielle et les récupérations touristiques. Les migrations dramatiques se sont succédées avec, pour la France, les périodes noires de 1914 et de 1940. Cette année-là, j’avais douze ans. J’ai conservé le souvenir de ces réfugiés belges et français et de mes camarades de classe qui me racontaient les douloureuses péripéties de leur exode vers la Méditerranée. Quelques années plus tôt, notre région avait « accueilli » les réfugiés qui fuyaient les dangers mortels de la révolution en Espagne. Ils étaient républicains ces espagnols qui demandaient asile à la république française. Beaucoup furent internés dans des camps aux baraquements sordides, à Rivesaltes et ailleurs. Ces « migrants » se sont parfaitement intégrés au fil des années et ont apporté une coloration pittoresque à la population de la région ; malgré des réticences qui parfois confinaient à du racisme. J’ai personnellement constaté ces comportements, par exemple lors de l’emploi de vendangeurs alors que j’étais adolescent. Quand j’entends des arguments de notre époque qui souhaitent qu’après les conflits en cours les réfugiés accueillis soient renvoyés dans leur pays, je m’interroge sur le sort qui aurait été celui des républicains espagnols renvoyés chez Franco après la révolution. (?) Les années 1960 ont été marquées par des migrations massives lorsque des français dont les familles étaient installées depuis plusieurs générations en Afrique du Nord, et particulièrement en A1gérie, ont été contraintes de rejoindre le territoire de la France. On utilisait le mot « rapatriement », mais il s’agissait aussi de réfugiés qui fuyaient les massacres d’une guerre qui n’osait pas être avouée. Cette « migration » n’a pas toujours été facilement acceptée par les populations qui recevaient les « pieds noirs ». C’est ainsi qu’étaient appelés ces réfugiés dont l’installation qui s’annonçait définitive n’était pas sans poser quelques problèmes. Les problèmes sociaux et économiques auxquels s’ajoutaient des mentalités différentes parfois mal perçues et des façons de vivre originales ont été résolus petit à petit. L’intégration a fait apparaître les éléments positifs de cet apport important de population qui a sensiblement fait évoluer l’ambiance de la société de toute une région. Mes activités au sein de services sociaux m’ont placé au contact d’une autre catégorie de réfugiés qui a été moins connue. Les révolutions dans des pays asiatiques ont contraint des populations de l’ancienne Indochine colonisée par la France à s’expatrier vers d’hypothétiques terres d’asile. J’ai rencontré plusieurs de ces familles. Les récits de ceux qui avaient été piratés en pleine mer sont effroyables ; et j’en ai entendu plusieurs… Fuir la guerre et ses massacres, tenter de sauver sa peau et de protéger sa famille en devenant un « réfugié » à la recherche de la protection des peuples qui vivent dans la paix et le confort, est une situation de toutes les époques. Nul ne peut affirmer qu’il sait qui la subira dans un futur proche ou lointain… Sans être pessimistes nous pouvons considérer avec lucidité que dans notre XXIème siècle personne n’est totalement à l’abri. Ne perdons pas notre temps à critiquer ou à juger ceux qui sont disposés à subir quelques inconvénients pour partager et ceux qui protègent farouchement leurs intérêts et leur confort. Et si demain nous étions à la place de ces malheureux arrivants ? … Ils viennent comme des mendiants qui méritent de conserver leur dignité. Ils ont peur, ils ont faim et ils sont demandeurs… Et si demain d’autres peuples persécutés et affamés venaient vers nous en manifestant leur colère et des armes à la main ? Je crois que quand on donne on reçoit toujours quelque chose en retour, même si l’on ne l’attend pas. Mais quand on affiche son confort face à ceux qui souffrent et se font massacrer, et qu’on ne pense qu’à se protéger, on risque d’attiser les convoitises, la haine et les mœurs barbares qui sommeillent dans toute l’espèce humaine à toutes les époques.
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